La transformation digitale donne des opportunités inédites

Continuons la suite de notre saga en regardant comment les banques impulsent des démarches de transformations digitales et créent des opportunités nouvelles.

De nouveaux marchés apparaissent. Avec le crowdfunding, l’ensemble des grandes banques créent des plateformes pour renouveler leur image et s’ancrer davantage sur leurs territoires (Gwenneg, la plateforme des institutionnels, et Kengo pour Arkéa, Proximea pour Banque Populaire Atlantique,…) ou s’associent avec des partenaires plus agiles et maîtrisant le marketing sur certains segments de marché (La Banque Postale est associée à Kiss Kiss Bank Bank, Wormser Frères avec Lendix, Groupama et Unilend, Miimosa pour le Crédit Agricole…).

L’ambition est de toucher des cibles jusqu’alors difficilement accessibles. Il s’agit également d’occuper une position avec une nouvelle classe de produits financiers et de se doter de moyens de distributions complémentaires, tout en bénéficiant d’une meilleure connaissance client et des risques associés. Les montants collectés par les 86 plateformes recensées en France progressent pour atteindre 297 millions d’euros en 2015 mais les sommes restent résiduelles au regard des financements classiques.

Les robots apportent des améliorations

La gestion de portefeuille ou des placements sont également modernisés. Jusqu’alors réservés aux professionnels, les « robots advisors » délivrent désormais des
conseils directement en ligne à tout à chacun. La stratégie de positionnement est identique aux autres services financiers. Les banques occupent le terrain seules (Société générale avec Boursorama, ING…) et/ou ou avec des partenaires (wesave, Marie Quantier et Ysomoni pour Arkea). Outre-Manche, RBS s’est déjà positionnée à la fois sur une réduction drastique des coûts et sur une montée en gamme de ses services en laissant les clients les moins fortunés gérer leur propre portefeuille à l’aide de robots. Quant aux investisseurs les plus importants, ils bénéficient d’un conseiller avec des services à valeur ajoutée.

Les salles de marchés sont quant à elles passées au trading haute fréquence. Ces robots permettent à la banque d’être présente sur l’ensemble des marchés 24h/24, de bénéficier de conseils automatisés et d’éviter les erreurs. Pour un faible coût, le trading algorithmique est efficace. Par exemple, la BFI de BNP Paribas tire environ la moitié de ses revenus par ces systèmes. Ils permettent en outre aux traders d’anticiper les mouvements de prix et donnent la possibilité d’obtenir de l’information privée à haute valeur.

La blockchain apporte une finance sans intermédiaire

Tout un symbole : la blockchain a pris place chez Nasdaq avec une plateforme pour la gestion des marchés privés. Les plus grandes banques mondiales, pourtant rivales, s’allient dans R3 CEV pour mener une démarche de cocréation et travailler activement sur cette technologie sécurisée et décentralisée en vue de tenter de maîtriser la blockchain et d’en faire une infrastructure mondiale, et ainsi éviter la déperdition de l’argent et de l’information au profit de nouveaux acteurs.
« La Blockchain ou le Registre distribué (Distributed ledger), rendent aujourd’hui techniquement possible, pour la première fois dans l’histoire, l’émergence d’un système complétement décentralisé, c’est-à-dire où les transactions pourraient potentiellement s’opérer sans intermédiaires financiers et sans banque centrale », prévenait le 7 juin dernier François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France.
Cette technologie chamboule l’industrie financière. Outre la vitesse de traitement rapide des opérations, le coût des règlements pourrait diminuer de 16 milliards de dollars par an, réduire les besoins en capitaux de 120 milliards d’euros et anéantir 2 millions d’emplois d’ici à 10 ans !

escalator

Le numérique donne de nouvelles perspectives et chamboule les frontières.

Le numérique transforme les organisations

Parallèlement, la transformation numérique est également opérée en interne. « 86% des jeunes qui arrivent sur le marché du travail s’attendent à être équipés de terminaux mobiles par leur entreprise ». C’est le constat dressé par une étude d’Orange, publiée en 2014, sur les nouveaux modes de travail. « 96 % s’attendent à avoir le choix
quant à leur lieu de travail et 83 % quant au moment où ils travaillent ».

Le digital devient une condition d’attractivité

Le numérique devient une condition d’attractivité du secteur, pour attirer et fidéliser les talents et décideurs de demain. Ces nouveaux salariés sont mobiles géographiquement, temporellement et professionnellement. Ils ont de nouvelles pratiques collaboratives. Pour exploiter les compétences et mieux appréhender leur besoins et
impact sur la structure, le Crédit Agricole, par exemple, a créé des réseaux sociaux internes avec des communautés dédiées aux alternants et stagiaires. Il s’agit d’identifier leurs attentes et de les inclure dans la future organisation et carrières professionnelles.

Des démarches venues de l’informatique

Pour s’ouvrir aux innovations digitales, les banques déploient de nouveaux programmes afin d’imprégner leurs personnels. A titre d’illustration, la Société Générale organise de nombreuses conférences avec des experts ou mobilise ses salariés sur des hackathons pour que ses collaborateurs s’enrichissent des nouvelles pratiques, tendances et outils. Quant à BNP Paribas, elle a lancé People’s Lab pour renforcer ses démarches d’innovation tout en améliorant les compétences de ses collaborateurs. Ce programme permet au salarié de porter et de concrétiser son projet en interne et d’éventuellement l’externaliser.

La coopétition brise les repères traditionnels

Les banques sont également passées à une logique de coopétition (coopération et compétition). Les postures d’autrefois doivent être oubliées : les rivaux deviennent désormais des partenaires. L’exemple le plus significatif est le regroupement de Société Générale, BNP Paribas, Arkéa, La Banque Postale et Crédit Agricole au sein de Paylib ou encore de R3.

L’ambition est de réaliser des économies d’échelle, de bénéficier d’une surface et de compétences technologiques et commerciales importantes. Il s’agit de limiter les risques et de lancer une solution innovante rapidement, permettant de soutenir et de maîtriser l’écosystème. Ces nouvelles situations imposent des structures et schémas mentaux nouveaux pour appréhender ces collaborations jusqu’alors perçues comme contradictoires.

Les banques deviennent des plateformes ouvertes

Enfin, les banques installent des démarches de co-créations avec des partenaires, start-ups, fournisseurs et clients. A titre d’illustration, Société Générale a constitué
une communauté de 28 000 personnes prêtes à réfléchir et à co-construire ses projets. Ce gisement représente des milliers d’heures de travail mobilisables immédiatement. C’est également la démonstration que le numérique dématérialise toute structure, y compris les banques qui s’engagent progressivement à devenir des « plateformes d’intelligence collectives », selon le concept de Joël de Rosnay.
Patrice REMEUR